Haïti-Paysannerie : Les 25 ans du massacre de Jean-Rabel

23/07/2012
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L’organisation Tèt Kole Ti Peyizan (Union des petits paysans) commémore ce 23 juillet les 25 ans du massacre des paysans à Jean Rabel (Nord-ouest) dans le contexte de « la liquidation des ressources minières et des terres du pays », apprend AlterPresse.
 
Le thème de cette commémoration est : « stopper la liquidation des terres et des mines du pays aux etrangers : les paysans ne deviendront pas des pèlerins sur le sol de Dessalines (héros de l’indépendance d’Haiti) ». Le 23 juillet 1987, environ 139 paysannes et paysans (chiffre officiel fourni par le Conseil national de gouvernement/Cng de l’époque) ont été assassinés par des militaires, des anciens membres de la milice des Duvalier et des grands propriétaires terriens, selon les informations disponibles.
 
Jusqu’à date, les auteurs de ces atrocités n’ont pas été inquiétés.
 
Selon les précisions de Jean Jacques Henrilus, membre de la coordination de Tèt kole, les activités ont débuté depuis le « 22 juillet 2012 par une conférence prononcée par l’économiste Camille Chalmers sur la main mise sur les mines et la problématique de l’accaparement des terres au centre Gwo Bassin (localité de Jean-Rabel).
 
Des conférences-débats, des sit-in, des messages d’occasions sont prévus au programme.
 
Ce 23 juillet 2012, des paysans de Plaisance (Nord) réfléchissent sur le thème « quelle justice pour qui ? » pour mieux comprendre l’impunité qui sévit dans le pays surtout en faveur de certains groupes économiquement et politiquement dominants. Un sit-in pour exiger justice pour les paysans de Jean-Rabel suivra les débats, selon Henrilus.
 
Limbé (Nord), Cornillon-GrandBois (Ouest), Cavaillon (Sud) marqueront la commémoration de ces 25 années. Mais Jean-Rabel est le haut-lieu des activités.
 
« Ce matin [23 juillet 2012] nous avons planté 139 arbres à dans la zone de Leban à la mémoire des 139 victimes pour signifier que leur mort doit contribuer à la vie pour la lutte de libération des opprimés », soutient Osnel Jean-Baptiste, joint par AlterPresse.
 
Quelques heures après, plusieurs délégations de paysans et d’autres personnalités des milieux progressistes haïtiens se sont retrouvés à la section Bazin à Jean-Rabel pour écouter le message d’occasion délivré près du monument élevé à la mémoire des paysans massacrés.
 
Une grande affiche a été installée sur le monument ainsi que des photos des lieux du massacre et des massacrés.
 
Les grands propriétaires terriens du Nord-Ouest sont soupçonnés d’avoir incendié 15 maisons de paysans le 9 mai 1986 en compagnie de bandits à leur solde, selon Osnel Jean-Baptiste.
 
L’organisation « Tèt kole ti peyizan ayisyen » a été créée le 6 septembre 1986 à la suite d’une décision prise par plusieurs groupements locaux (« groupman tèt ansanm ») de lancer un mouvement sur tout le territoire national.
 
25 ans après…
 
25 ans après le plus grand massacre de paysans dans l’histoire haïtienne, Jean Jacques Henrilus ne se réjouit pas de constater que « la situation des paysans va en s’aggravant et qu’il y a une certaine démobilisation et une baisse de l’engouement dans la lutte ».
 
Toutefois, les revendications des paysans liées fondamentalement au problème de la terre, de son accaparement par les grands propriétaires et aujourd’hui par des étrangers à la faveur de l’amendement de la constitution de 1987 ne changent pas, indique Henrilus.
 
« Le mouvement paysan haitien en particulier s’est laissé piéger par le mirage démocratique, surtout avec les élections de 1990 que les paysans ont appréhendé comme une victoire et la marche vers l’instauration d’un gouvernement populaire. Ils ont pensé que c’était le pouvoir des paysans », regrette le membre de la coordination de Tèt kole.
 
Henrilus cherche aussi la cause de « la démobilisation » dans ce qu’il appelle l’ « ONG-isation des organisations de paysans ».
 
« L’idéologie developpementiste répandue par les ONG et marquée par la logique et la pratique de recherche de financement pour de petits projets est l’une des armes destructrices de l’énergie combattive du mouvement paysan haïtien », soutient-il.
 
25 ans après, les vieux démons, semble-t-il, n’ont pas été totalement exorcisés puisque dans le Nord-Ouest, précisément à Jean-Rabel, les paysans n’ont plus quiétude d’esprit. Ils recommencent à être « persécutés et intimidés par les grands propriétaires terriens », notamment « les cerveaux du massacre de Jean-Rabel », rapporte Tèt Kole Ti Peyizan.
 
 
 
https://www.alainet.org/en/node/159782
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