La MINUSTAH au cœur des débats, à l’approche de la fin de son mandat
07/02/2007
- Opinión
P-au-P., 7 févr. 07 [AlterPresse] --- « Faut-il proroger le mandat de la Mission des Nations Unies pour la Stabilisation en Haïti (MINUSTAH) ? Si oui, pour combien de temps : six mois, un an, cinq ans, dix ans ? Si non, que faire » ?
Autant de questions qui font l’objet de débats au sein de la société haïtienne, à l’approche de la fin du mandat de cette mission onusienne prévue pour le 15 février 2007 !
D’aucuns réclament le départ immédiat de la MINUSTAH, composée de 7 200 casques bleus, dont quelques 6 600 militaires et plus de 1 700 policiers, et d’une centaine de civils, qu’ils jugent « inutile » et, en outre, « trop coûteuse » pour le pays.
D’autres, notamment les membres du gouvernement actuel, demandent le maintien de cette force multinationale qu’ils considèrent comme « nécessaire » dans la lutte contre les bandits et les gangs armés qui sèment le deuil dans les familles haïtiennes depuis plus de deux ans.
Ce débat invite à analyser la situation actuelle du pays au plan sécuritaire à la lumière des opérations militaires intensives menées par la MINUSTAH durant les deux derniers mois, dans le contexte de l’expiration du délai de son mandat qui a été fixée, depuis le 15 août 2006, par la Résolution 1702 du Conseil de Sécurité de l’Organisation des Nations Unies (ONU).
La situation sécuritaire actuelle du pays
L’année 2006 s’est terminée par une forte vague de kidnappings, frappant en particulier les élèves.
Des citoyennes, citoyens et organisations de la société civile, notamment les étudiants et écoliers de différents établissements scolaires et universitaires, ont enclenché un mouvement de protestation pour exiger du gouvernement haïtien de renoncer à négocier avec les bandits et de prendre, au contraire, des mesures énergiques contre ceux-ci. Ils ont aussi demandé le retrait de la MINUSTAH qui, selon eux, « n’a rien fait » pour aider la population à faire face à ce climat d’insécurité.
En ce début d’année, l’insécurité connaît une baisse relative. En janvier 2007, elle a fait, selon la MINUSTAH, 41victimes, dont 39 personnes kidnappées, contre 64 cas d’enlèvement pour un total de 129 victimes au cours du mois de décembre 2006.
Les habitants de la Capitale haïtienne, Port-au-Prince, ont commencé à retrouver une paix apparente, en dépit de plusieurs cas de violence et d’un regain progressif d’insécurité enregistrés dans certains quartiers. Certaines zones de la Capitale sont encore contrôlées par des gangs armés, dont « Lame Ti Manchèt » (Armée de petites machettes) et « Baz Pilat » (Base Pilate).
Les kidnappeurs ont été obligés de diminuer leurs activités criminelles, parce que plusieurs d’entre eux ont été tués, appréhendés ou contraints de prendre le maquis. Cependant, quelques-uns continuent à séquestrer hommes, femmes et enfants, presque quotidiennement, à Port-au-Prince et dans ses périphéries, et dans d’autres villes importantes du pays. Ils n’enlèvent pas leurs proies dans les rues, qui sont de plus en plus investies par la Police Nationale d’Haïti et la MINUSTAH, mais les arrachent de leurs propres maisons, notent les médias.
À présent, les forces de l’ordre sont en train d’envisager des stratégies appropriées pour faire face à la nouvelle manière de procéder des bandits.
Les opérations militaires intensives de la MINUSTAH
Entre-temps, des opérations militaires et policières sont conduites conjointement par la MINUSTAH et la Police Nationale d’Haïti (PNH) dans des zones à risques, depuis la fin de décembre 2006. La MINUSTAH a annoncé une augmentation de la fréquence de ces opérations dans les quartiers volatiles, dont Martissant (périphérie sud) et Cité Soleil (périphérie nord), afin de traquer les bandits.
La première de ces opérations a été menée le 22 décembre 2006 à Bois-Neuf, quartier de Cité Soleil. Les troupes onusiennes sont intervenues de manière spectaculaire pour « récupérer un véhicule blindé, dont une bande armée opérant dans ce quartier populaire s’était emparée la veille ».
Ce genre d’intervention s’est poursuivi tout au cours du mois de janvier 2007. Par exemple, le 24 janvier, 250 soldats onusiens et 20 blindés sont descendus à Boston, un autre quartier de Cité Soleil, pour « prendre le contrôle du Bâtiment bleu », maison qui servirait de base à des gangs armés.
Cependant, des citoyennes, citoyens et secteurs de la société haïtienne ont dénoncé ces opérations musclées qui, selon eux, sont réalisées « sans discernement » et ont fait des victimes civiles n’ayant rien à voir avec les bandits et gangs armés. Des cas de vieillards, d’enfants et même de bébés grièvement blessés et tués ont été signalés.
Et pourquoi maintenant ?
À la fin de 2006, plus précisément au cours du mois de novembre et durant les trois premières semaines de décembre, les bandits armés avaient pratiquement pris le contrôle de la Capitale haïtienne, au su et au vu de la MINUSTAH, des autorités gouvernementales et étatiques du pays. Les familles haïtiennes pleuraient leurs victimes.
La société toute entière se sentait abandonnée à elle-même. Pourtant, la MINUSTAH n’avait pas donné de réponses proportionnelles à cette situation.
Beaucoup de gens se demandent pourquoi la MINUSTAH s’est-elle décidée seulement récemment, à l’approche de la fin de son mandat, à faire des interventions militaires intensives et, dans une certaine mesure, « démesurées » ?
Des citoyennes et citoyens qualifient d’ « opportunistes » ces interventions militaires de la MINUSTAH, en arguant qu’elle ne se soucierait pas vraiment de donner de la sécurité à la population, mais d’obtenir plutôt la prorogation de son mandat.
Entre la volonté de maintenir le pays dépendant et l’incapacité des dirigeants à gouverner
Au-delà des doutes, des critiques et des sentiments de malaise exprimés par une grande partie de la société haïtienne à l’égard de la MINUSTAH, il convient de poser ces questions qui demeurent encore sans réponse :
Va-t-on créer la Gendarmerie Nationale ou re-mobiliser les Forces Armées d’Haïti ? Quelles dispositions prendra-t-on pour s’assurer de la présence de forces de l’ordre haïtiennes en mesure de faire face à la situation présente, dans le respect des normes démocratiques ?
Pour combien de temps la MINUSTAH restera-t-elle dans le pays ? Quand est-ce que la Communauté internationale commencera-t-elle à envisager un retrait échelonné de la mission onusienne en Haïti ?
D’une part, les autorités étatiques et gouvernementales haïtiennes sont appelées à prendre des décisions fondamentales pour assumer et garantir la sécurité et la sûreté des vies et des biens des citoyennes et citoyens.
D’autre part, la Communauté internationale est confrontée au défi d’ « accompagner l’État haïtien » et de l’aider à assumer et à résoudre un ensemble de problèmes (dont l’insécurité) auxquels le pays est confronté, mais tout en respectant la souveraineté de cet État et l’autodétermination du peuple haïtien.
Le peuple haïtien se sent de plus en plus pris entre deux feux : une certaine incapacité de ses dirigeants à gouverner et une volonté de quelques pays et organismes de la Communauté internationale de le maintenir dépendant, alors que les réflexions et initiatives relatives à une sortie autonome de cette situation ne parviennent pas à l’opinion publique.
Autant de questions qui font l’objet de débats au sein de la société haïtienne, à l’approche de la fin du mandat de cette mission onusienne prévue pour le 15 février 2007 !
D’aucuns réclament le départ immédiat de la MINUSTAH, composée de 7 200 casques bleus, dont quelques 6 600 militaires et plus de 1 700 policiers, et d’une centaine de civils, qu’ils jugent « inutile » et, en outre, « trop coûteuse » pour le pays.
D’autres, notamment les membres du gouvernement actuel, demandent le maintien de cette force multinationale qu’ils considèrent comme « nécessaire » dans la lutte contre les bandits et les gangs armés qui sèment le deuil dans les familles haïtiennes depuis plus de deux ans.
Ce débat invite à analyser la situation actuelle du pays au plan sécuritaire à la lumière des opérations militaires intensives menées par la MINUSTAH durant les deux derniers mois, dans le contexte de l’expiration du délai de son mandat qui a été fixée, depuis le 15 août 2006, par la Résolution 1702 du Conseil de Sécurité de l’Organisation des Nations Unies (ONU).
La situation sécuritaire actuelle du pays
L’année 2006 s’est terminée par une forte vague de kidnappings, frappant en particulier les élèves.
Des citoyennes, citoyens et organisations de la société civile, notamment les étudiants et écoliers de différents établissements scolaires et universitaires, ont enclenché un mouvement de protestation pour exiger du gouvernement haïtien de renoncer à négocier avec les bandits et de prendre, au contraire, des mesures énergiques contre ceux-ci. Ils ont aussi demandé le retrait de la MINUSTAH qui, selon eux, « n’a rien fait » pour aider la population à faire face à ce climat d’insécurité.
En ce début d’année, l’insécurité connaît une baisse relative. En janvier 2007, elle a fait, selon la MINUSTAH, 41victimes, dont 39 personnes kidnappées, contre 64 cas d’enlèvement pour un total de 129 victimes au cours du mois de décembre 2006.
Les habitants de la Capitale haïtienne, Port-au-Prince, ont commencé à retrouver une paix apparente, en dépit de plusieurs cas de violence et d’un regain progressif d’insécurité enregistrés dans certains quartiers. Certaines zones de la Capitale sont encore contrôlées par des gangs armés, dont « Lame Ti Manchèt » (Armée de petites machettes) et « Baz Pilat » (Base Pilate).
Les kidnappeurs ont été obligés de diminuer leurs activités criminelles, parce que plusieurs d’entre eux ont été tués, appréhendés ou contraints de prendre le maquis. Cependant, quelques-uns continuent à séquestrer hommes, femmes et enfants, presque quotidiennement, à Port-au-Prince et dans ses périphéries, et dans d’autres villes importantes du pays. Ils n’enlèvent pas leurs proies dans les rues, qui sont de plus en plus investies par la Police Nationale d’Haïti et la MINUSTAH, mais les arrachent de leurs propres maisons, notent les médias.
À présent, les forces de l’ordre sont en train d’envisager des stratégies appropriées pour faire face à la nouvelle manière de procéder des bandits.
Les opérations militaires intensives de la MINUSTAH
Entre-temps, des opérations militaires et policières sont conduites conjointement par la MINUSTAH et la Police Nationale d’Haïti (PNH) dans des zones à risques, depuis la fin de décembre 2006. La MINUSTAH a annoncé une augmentation de la fréquence de ces opérations dans les quartiers volatiles, dont Martissant (périphérie sud) et Cité Soleil (périphérie nord), afin de traquer les bandits.
La première de ces opérations a été menée le 22 décembre 2006 à Bois-Neuf, quartier de Cité Soleil. Les troupes onusiennes sont intervenues de manière spectaculaire pour « récupérer un véhicule blindé, dont une bande armée opérant dans ce quartier populaire s’était emparée la veille ».
Ce genre d’intervention s’est poursuivi tout au cours du mois de janvier 2007. Par exemple, le 24 janvier, 250 soldats onusiens et 20 blindés sont descendus à Boston, un autre quartier de Cité Soleil, pour « prendre le contrôle du Bâtiment bleu », maison qui servirait de base à des gangs armés.
Cependant, des citoyennes, citoyens et secteurs de la société haïtienne ont dénoncé ces opérations musclées qui, selon eux, sont réalisées « sans discernement » et ont fait des victimes civiles n’ayant rien à voir avec les bandits et gangs armés. Des cas de vieillards, d’enfants et même de bébés grièvement blessés et tués ont été signalés.
Et pourquoi maintenant ?
À la fin de 2006, plus précisément au cours du mois de novembre et durant les trois premières semaines de décembre, les bandits armés avaient pratiquement pris le contrôle de la Capitale haïtienne, au su et au vu de la MINUSTAH, des autorités gouvernementales et étatiques du pays. Les familles haïtiennes pleuraient leurs victimes.
La société toute entière se sentait abandonnée à elle-même. Pourtant, la MINUSTAH n’avait pas donné de réponses proportionnelles à cette situation.
Beaucoup de gens se demandent pourquoi la MINUSTAH s’est-elle décidée seulement récemment, à l’approche de la fin de son mandat, à faire des interventions militaires intensives et, dans une certaine mesure, « démesurées » ?
Des citoyennes et citoyens qualifient d’ « opportunistes » ces interventions militaires de la MINUSTAH, en arguant qu’elle ne se soucierait pas vraiment de donner de la sécurité à la population, mais d’obtenir plutôt la prorogation de son mandat.
Entre la volonté de maintenir le pays dépendant et l’incapacité des dirigeants à gouverner
Au-delà des doutes, des critiques et des sentiments de malaise exprimés par une grande partie de la société haïtienne à l’égard de la MINUSTAH, il convient de poser ces questions qui demeurent encore sans réponse :
Va-t-on créer la Gendarmerie Nationale ou re-mobiliser les Forces Armées d’Haïti ? Quelles dispositions prendra-t-on pour s’assurer de la présence de forces de l’ordre haïtiennes en mesure de faire face à la situation présente, dans le respect des normes démocratiques ?
Pour combien de temps la MINUSTAH restera-t-elle dans le pays ? Quand est-ce que la Communauté internationale commencera-t-elle à envisager un retrait échelonné de la mission onusienne en Haïti ?
D’une part, les autorités étatiques et gouvernementales haïtiennes sont appelées à prendre des décisions fondamentales pour assumer et garantir la sécurité et la sûreté des vies et des biens des citoyennes et citoyens.
D’autre part, la Communauté internationale est confrontée au défi d’ « accompagner l’État haïtien » et de l’aider à assumer et à résoudre un ensemble de problèmes (dont l’insécurité) auxquels le pays est confronté, mais tout en respectant la souveraineté de cet État et l’autodétermination du peuple haïtien.
Le peuple haïtien se sent de plus en plus pris entre deux feux : une certaine incapacité de ses dirigeants à gouverner et une volonté de quelques pays et organismes de la Communauté internationale de le maintenir dépendant, alors que les réflexions et initiatives relatives à une sortie autonome de cette situation ne parviennent pas à l’opinion publique.
Source: ALTERPRESSE
https://www.alainet.org/es/node/119189
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