La position de Via Campesina sur le réchauffement climatique
Les paysan(ne)s qui pratiquent une agriculture durable contribuent à refroidir la terre
12/11/2007
- Opinión
Les modes de production et de consommation actuels sont à l’origine d’une destruction massive de l’environnement dont le changement climatique fait partie. Ils mettent en danger les écosystèmes de notre planète et entraînent les communautés humaines au désastre. Le réchauffement climatique démontre l’échec d’un modèle de développement fondé sur une forte consommation d’énergies fossiles, la surproduction et la libéralisation du commerce.
Partout dans le monde, les paysans et paysannes s’associent avec d’autres mouvements sociaux, organisations, peuples et communautés pour obtenir des transformations sociales, économiques, et politiques permettant de renverser cette tendance actuelle.
Les agriculteurs - et plus particulièrement les petits paysans – sont les premiers à pâtir du changement climatique. Les changements du climat génèrent des sécheresses inhabituelles, des inondations et des tempêtes, qui détruisent les terres agricoles, les récoltes et les maisons. De plus, les espèces végétales et animales disparaissent à une vitesse sans précédent. Les paysans doivent s’ajuster à ces changements en adaptant leurs semences et leurs systèmes de production à ces nouvelles situations imprévisibles. De plus, les sécheresses et les inondations provoquent de mauvaises récoltes, augmentant par là même le nombre de personnes souffrant de la faim dans le monde. Des études prévoient une chute des rendements agricoles de 3 à 16% d’ici 2080. Dans les régions tropicales, le réchauffement climatique est susceptible de conduire à un déclin important de l’agriculture (jusqu’à 50% au Sénégal et 40% en Inde) et à une accélération de la transformation de terres cultivables en déserts. Dans le même temps, des superficies considérables en Russie et au Canada vont devenir des terres arables et ce pour la première dans l’histoire de l’humanité. Cependant, la capacité productive de ces régions demeure une inconnue.
La production et l’utilisation d’aliments par les multinationales contribuent sensiblement au réchauffement climatique et à la destruction des communautés rurales. Le transport d’aliments d’un continent à l’autre, la monoculture intensive, la destruction des terres et des forêts, et l’utilisation d’intrants chimiques en agriculture font de l’agriculture une activité énergivore contribuant au changement climatique. En raison des politiques néo-libérales imposées par l’organisation mondiale du commerce, par les accords régionaux et bilatéraux de libre échange, par la Banque mondiale et le Fonds monétaire international, les aliments sont produits en ayant recours à des pesticides et des engrais dont la production consomme du pétrole. Du fait de ces mêmes politiques, les aliments sont transportés tout autour de la terre pour être transformés et consommés.
Via Campesina, en tant que mouvement regroupant des millions de petits paysans et de producteurs au travers le monde, affirme que le moment est venu de modifier radicalement notre façon de produire, de transformer, de commercialiser et de consommer les produits alimentaires et agricoles. Nous croyons que les petites fermes en agriculture durable et la consommation d’aliments locaux peuvent renverser la tendance dévastatrice actuelle et venir en soutien à des millions de familles vivant de l’agriculture. L’agriculture peut aussi contribuer à réduire l’effet de serre par des pratiques qui permettent de stocker du CO2 et qui réduisent considérablement l’utilisation d’énergie sur les fermes.
De plus, les fermes peuvent aussi participer à la production d’énergies renouvelables, énergie solaire et biogaz notamment.
La globalisation de l’agriculture et le contrôle par les multinationales de la production d’aliments sont responsables du changement climatique
1/ En transportant des aliments tout autour de la terre
Les aliments frais et emballés voyagent autour du monde. En Europe et aux Etats-Unis, il est désormais courant de trouver des fruits et légumes, de la viande ou du vin, ayant été produits en Afrique, en Amérique du Sud, ou en Océanie. De même, on trouve du riz asiatique en Amérique ou en Afrique. Le fuel fossile utilisé pour le transport des aliments relâche dans l’atmosphère des tonnes de CO2. L’organisation des paysans suisses UNITERRE a calculé qu’un kilogramme d’asperges importé du Mexique nécessite 5 litres de kérosène pour être transporté par avion jusqu’en Suisse (11’800km). Dans le même temps, pour arriver jusqu’au consommateur un kilo d’asperges produit en Suisse ne consomme que 0,3 litres de pétrole.
2/ En imposant des modes de production industriels (mécanisation, intensification, utilisation de produits chimiques, monoculture…)
L’agriculture « soit disante modernisée » et en particulier les systèmes de monoculture industriels, détruisent les processus naturels d’humification qui ont lieu dans les sols (stockage du CO2 sous forme de matière organique) et les remplacent par des procédés chimiques utilisant des engrais et des pesticides. En raison notamment de l’utilisation d’engrais chimiques, l’agriculture intensive et la monoculture pour la production animale produisent d’importantes quantités de dioxyde d’azote (NO2). Or, ce gaz arrive troisième au palmarès des gaz à effet de serre responsables du réchauffement climatique. En Europe, 40% de l’énergie consommée sur les fermes est dû à la production des engrais azotés. Par ailleurs, la production industrielle consomme beaucoup plus d’énergie (et relâche dans l’atmosphère beaucoup plus de CO2) pour la transformation des aliments et pour faire fonctionner les énormes tracteurs qui labourent et hersent la terre.
3/ En détruisant la biodiversité (et les puits de carbones)
Le carbone présent dans l’air est naturellement capturé par les plantes puis stocké dans le bois ou sous forme de matières organiques dans les sols. Certains écosystèmes, comme les forêts primaires, les tourbières, et les prairies stockent plus de carbone que d’autres. De puis des millénaires, ce mécanisme du cycle du carbone a participé à l’équilibre du climat. Les multinationales ont désormais détruit cet équilibre en imposant l’extension généralisée d’une agriculture industrielle (utilisant massivement des pesticides et des fertilisants produits à partir du pétrole), en brûlant des forêts pour créer des plantations en monoculture et en détruisant les tourbières et la biodiversité.
4/ En convertissant les terres et les forêts en zones non agricoles
Les forêts, les prairies et les terres cultivées sont rapidement converties en zones de production agricoles industrielles ou en centres commerciaux, en complexes industriels, en zones de logements, en infrastructures routières ou touristiques. Ces changements provoquent des relâchements massifs de carbone dans l’atmosphère et réduisent la capacité de l’environnement à absorber le carbone relâché dans l’atmosphère.
5/ En convertissant l’agriculture d’un producteur d’énergie à un consommateur d’énergies
Sur le plan énergétique, le rôle premier des plantes et de l’agriculture est de transformer l’énergie solaire en sucres et en cellulose qui peuvent être directement assimilés comme aliments ou transformés en produits animaux par les animaux. Par ce processus naturel de l’énergie est incorporé dans la chaîne alimentaire. Mais, au cours de ces deux derniers siècles, l’industrialisation de l’agriculture a fait de cette activité une consommatrice d’énergie (engrais, utilisation des tracteurs, produits chimiques issus du pétrole…)
Les fausses solutions
Les agrocarburants (carburants produits à partir des plantes, de l’agriculture et de la forêt) sont souvent présentés comme une des solutions à la crise énergétique actuelle. D’après le protocole de Kyoto, d’ici 2020, 20% de la consommation énergétique globale devrait provenir de sources renouvelables, consommation d’agrocarburants inclue. Or, au-delà même de l’aberration de produire des aliments pour alimenter les voitures alors que de nombreuses personnes meurent de faim, la production industrielle d’agrocarburants va en fait augmenter le réchauffement général du climat au lieu de le réduire. En vue d’économies d’énergies fossiles mineures ou non réellement prouvées (sauf dans le cas de la canne à sucre), la production d’agrocarburants augmentera les surfaces de plantations intensives d’huile de palme, de soja, de maïs, de canne à sucre. Elle contribuera à la déforestation et à la destruction de la biodiversité. La production intensive d’agrocarburants n’est donc pas une solution au réchauffement climatique, et ne permettra pas de résoudre la crise globale du secteur agricole
Le commerce du Carbone
D’après le protocole de Kyoto et d’autres accords internationaux, le“commerce de carbone”est présenté comme une solution au réchauffement climatique. C’est en fait une privatisation du carbone, après celle de la terre, de l’air, des semences, de l’eau et des autres ressources. Les gouvernements s’autorisent ainsi à allouer à de grosses industries polluantes des permis afin qu’elles puissent échanger entre elles des « droits à polluer ». D’autres programmes encouragent les pays industriels à financer la capture de carbone en réalisant des plantations à large échelle dans les pays du Sud, ceci leur permet de ne pas avoir à réduire leurs propres émissions. C’est ainsi que de grandes plantations ou des réserves naturelles sont créées en Asie, en Afrique, en Amérique Latine en expulsant de leurs terres des communautés indigènes et en réduisant leurs droits d’accès à leur propre forêts, champs ou rivières…
Les plantes et arbres génétiquement modifiés
Les arbres et les plantes génétiquement modifiés sont désormais développés pour la production d’agrocarburants. Les organismes génétiquement modifiés ne résoudront aucune crise environnementale puisqu’ils représentent eux-mêmes un risque pour l’environnement, la santé et la sécurité. De plus, ils renforcent le contrôle des multinationales sur les semences et empêchent les agriculteurs de jouir de leurs droits pour semer, développer, sélectionner, diversifier et échanger leurs propres semences. Les arbres et les plantes génétiquement modifiés vont servir pour la deuxième génération d’agrocarburants qui seront fabriqués à partir de cellulose à la différence de ceux de la première génération qui sont obtenus à partir de sucres provenant des plantes. Même s’ils n’avaient pas recours aux organismes génétiquement modifiés, la seconde génération d’agrocarburants soulève des préoccupations équivalentes à la première.
La souveraineté alimentaire permet à des millions de personnes de survivre et protège la vie sur terre
Via Campesina pense que des solutions à la crise actuelle doivent émerger des acteurs sociaux qui développent des modes de production, de commerce et de consommation fondés sur la justice, la solidarité, et une vie en société plus saine. Aucune solution technique ne permettra de sortir du désastre environnemental et social actuel. En revanche, l’agriculture durable à plus petite échelle requiert une main d’œuvre importante mais peu d’énergie fossile. Elle peut donc contribuer à refroidir la terre :
En favorisant, par des pratiques agronomiques durables, un stockage plus important du CO2 dans la matière organique du sol (par exemple, l’élevage extensif des bovins et la production ovine sur prairies ont un bilan effet de serre positif)
En remplaçant, comme c’est le cas en agriculture biologique, les engrais azotés chimiques par des engrais organiques et/ou en intégrant dans les rotations des plantes fixatrices de l’azote de l’air.
En produisant du biogaz à partir des déchets animaux et végétaux, tout en veillant à une restitution suffisante de matière organique pour l’entretien des sols.
En produisant de l’énergie solaire sur tous les toits des bâtiments agricoles (avec des soutiens publics pour aider les petites fermes à investir…)
Partout dans le monde, nous pratiquons et nous défendons l’agriculture familiale durable et à petite échelle, et nous réclamons la souveraineté alimentaire. La souveraineté alimentaire est le droit des populations à avoir une alimentation saine qui leur soit culturellement adaptée et produite grâce à des méthodes respectueuses de l’écologie et durables. C’est leur droit à définir eux-mêmes leur alimentation et leurs systèmes de production. La souveraineté alimentaire met au cœur des systèmes de production et des politiques les aspirations et les besoins de ceux qui produisent, distribuent et consomment les aliments au lieu d’y mettre la demande du marché et des multinationales. Elle donne la priorité aux économies et aux marchés locaux et nationaux. Elle redonne du pouvoir aux paysans et aux familles qui tirent leurs revenus de l’agriculture, de la pêche artisanale, du pastoralisme, de la production, de la distribution et de la consommation d’aliments produits de manière durable, c\'est-à-dire en respectant l’environnement, les hommes et les femmes, et l’économie.
Nous demandons urgemment :
1/ Le démantèlement intégral des multinationales de l’agrobusiness : Elles volent la terre aux petits paysans, produisent une alimentation de très mauvaise qualité et provoquent des désastres environnementaux.
2/ Le remplacement de l’agriculture et de l’élevage industriel par une agriculture durable pratiquée sur de petites fermes, ceci grâce à des programmes de réformes agraires adaptés.
3/ La promotion de politiques énergétiques saines et durables. C\'est-à-dire basée sur une moindre consommation d’énergie, la production d’énergie solaire et de biogaz sur les fermes au lieu d’une incitation excessive à consommer des énergies fossiles comme c’est actuellement le cas.
3/ La mise en œuvre de politiques agricoles et commerciales au niveau local, national et international qui soutiennent véritablement l’agriculture durable et la consommation d’aliments de proximité. Ceci implique l’interdiction des subventions qui favorisent les pratiques de dumping pour les produits alimentaires.
Pour la survie de millions de petits paysans au travers le monde,
Pour la santé des personnes et la survie de la planète,
Nous réclamons la souveraineté alimentaire et nous nous engageons à lutter pour l’obtenir collectivement.
Partout dans le monde, les paysans et paysannes s’associent avec d’autres mouvements sociaux, organisations, peuples et communautés pour obtenir des transformations sociales, économiques, et politiques permettant de renverser cette tendance actuelle.
Les agriculteurs - et plus particulièrement les petits paysans – sont les premiers à pâtir du changement climatique. Les changements du climat génèrent des sécheresses inhabituelles, des inondations et des tempêtes, qui détruisent les terres agricoles, les récoltes et les maisons. De plus, les espèces végétales et animales disparaissent à une vitesse sans précédent. Les paysans doivent s’ajuster à ces changements en adaptant leurs semences et leurs systèmes de production à ces nouvelles situations imprévisibles. De plus, les sécheresses et les inondations provoquent de mauvaises récoltes, augmentant par là même le nombre de personnes souffrant de la faim dans le monde. Des études prévoient une chute des rendements agricoles de 3 à 16% d’ici 2080. Dans les régions tropicales, le réchauffement climatique est susceptible de conduire à un déclin important de l’agriculture (jusqu’à 50% au Sénégal et 40% en Inde) et à une accélération de la transformation de terres cultivables en déserts. Dans le même temps, des superficies considérables en Russie et au Canada vont devenir des terres arables et ce pour la première dans l’histoire de l’humanité. Cependant, la capacité productive de ces régions demeure une inconnue.
La production et l’utilisation d’aliments par les multinationales contribuent sensiblement au réchauffement climatique et à la destruction des communautés rurales. Le transport d’aliments d’un continent à l’autre, la monoculture intensive, la destruction des terres et des forêts, et l’utilisation d’intrants chimiques en agriculture font de l’agriculture une activité énergivore contribuant au changement climatique. En raison des politiques néo-libérales imposées par l’organisation mondiale du commerce, par les accords régionaux et bilatéraux de libre échange, par la Banque mondiale et le Fonds monétaire international, les aliments sont produits en ayant recours à des pesticides et des engrais dont la production consomme du pétrole. Du fait de ces mêmes politiques, les aliments sont transportés tout autour de la terre pour être transformés et consommés.
Via Campesina, en tant que mouvement regroupant des millions de petits paysans et de producteurs au travers le monde, affirme que le moment est venu de modifier radicalement notre façon de produire, de transformer, de commercialiser et de consommer les produits alimentaires et agricoles. Nous croyons que les petites fermes en agriculture durable et la consommation d’aliments locaux peuvent renverser la tendance dévastatrice actuelle et venir en soutien à des millions de familles vivant de l’agriculture. L’agriculture peut aussi contribuer à réduire l’effet de serre par des pratiques qui permettent de stocker du CO2 et qui réduisent considérablement l’utilisation d’énergie sur les fermes.
De plus, les fermes peuvent aussi participer à la production d’énergies renouvelables, énergie solaire et biogaz notamment.
La globalisation de l’agriculture et le contrôle par les multinationales de la production d’aliments sont responsables du changement climatique
1/ En transportant des aliments tout autour de la terre
Les aliments frais et emballés voyagent autour du monde. En Europe et aux Etats-Unis, il est désormais courant de trouver des fruits et légumes, de la viande ou du vin, ayant été produits en Afrique, en Amérique du Sud, ou en Océanie. De même, on trouve du riz asiatique en Amérique ou en Afrique. Le fuel fossile utilisé pour le transport des aliments relâche dans l’atmosphère des tonnes de CO2. L’organisation des paysans suisses UNITERRE a calculé qu’un kilogramme d’asperges importé du Mexique nécessite 5 litres de kérosène pour être transporté par avion jusqu’en Suisse (11’800km). Dans le même temps, pour arriver jusqu’au consommateur un kilo d’asperges produit en Suisse ne consomme que 0,3 litres de pétrole.
2/ En imposant des modes de production industriels (mécanisation, intensification, utilisation de produits chimiques, monoculture…)
L’agriculture « soit disante modernisée » et en particulier les systèmes de monoculture industriels, détruisent les processus naturels d’humification qui ont lieu dans les sols (stockage du CO2 sous forme de matière organique) et les remplacent par des procédés chimiques utilisant des engrais et des pesticides. En raison notamment de l’utilisation d’engrais chimiques, l’agriculture intensive et la monoculture pour la production animale produisent d’importantes quantités de dioxyde d’azote (NO2). Or, ce gaz arrive troisième au palmarès des gaz à effet de serre responsables du réchauffement climatique. En Europe, 40% de l’énergie consommée sur les fermes est dû à la production des engrais azotés. Par ailleurs, la production industrielle consomme beaucoup plus d’énergie (et relâche dans l’atmosphère beaucoup plus de CO2) pour la transformation des aliments et pour faire fonctionner les énormes tracteurs qui labourent et hersent la terre.
3/ En détruisant la biodiversité (et les puits de carbones)
Le carbone présent dans l’air est naturellement capturé par les plantes puis stocké dans le bois ou sous forme de matières organiques dans les sols. Certains écosystèmes, comme les forêts primaires, les tourbières, et les prairies stockent plus de carbone que d’autres. De puis des millénaires, ce mécanisme du cycle du carbone a participé à l’équilibre du climat. Les multinationales ont désormais détruit cet équilibre en imposant l’extension généralisée d’une agriculture industrielle (utilisant massivement des pesticides et des fertilisants produits à partir du pétrole), en brûlant des forêts pour créer des plantations en monoculture et en détruisant les tourbières et la biodiversité.
4/ En convertissant les terres et les forêts en zones non agricoles
Les forêts, les prairies et les terres cultivées sont rapidement converties en zones de production agricoles industrielles ou en centres commerciaux, en complexes industriels, en zones de logements, en infrastructures routières ou touristiques. Ces changements provoquent des relâchements massifs de carbone dans l’atmosphère et réduisent la capacité de l’environnement à absorber le carbone relâché dans l’atmosphère.
5/ En convertissant l’agriculture d’un producteur d’énergie à un consommateur d’énergies
Sur le plan énergétique, le rôle premier des plantes et de l’agriculture est de transformer l’énergie solaire en sucres et en cellulose qui peuvent être directement assimilés comme aliments ou transformés en produits animaux par les animaux. Par ce processus naturel de l’énergie est incorporé dans la chaîne alimentaire. Mais, au cours de ces deux derniers siècles, l’industrialisation de l’agriculture a fait de cette activité une consommatrice d’énergie (engrais, utilisation des tracteurs, produits chimiques issus du pétrole…)
Les fausses solutions
Les agrocarburants (carburants produits à partir des plantes, de l’agriculture et de la forêt) sont souvent présentés comme une des solutions à la crise énergétique actuelle. D’après le protocole de Kyoto, d’ici 2020, 20% de la consommation énergétique globale devrait provenir de sources renouvelables, consommation d’agrocarburants inclue. Or, au-delà même de l’aberration de produire des aliments pour alimenter les voitures alors que de nombreuses personnes meurent de faim, la production industrielle d’agrocarburants va en fait augmenter le réchauffement général du climat au lieu de le réduire. En vue d’économies d’énergies fossiles mineures ou non réellement prouvées (sauf dans le cas de la canne à sucre), la production d’agrocarburants augmentera les surfaces de plantations intensives d’huile de palme, de soja, de maïs, de canne à sucre. Elle contribuera à la déforestation et à la destruction de la biodiversité. La production intensive d’agrocarburants n’est donc pas une solution au réchauffement climatique, et ne permettra pas de résoudre la crise globale du secteur agricole
Le commerce du Carbone
D’après le protocole de Kyoto et d’autres accords internationaux, le“commerce de carbone”est présenté comme une solution au réchauffement climatique. C’est en fait une privatisation du carbone, après celle de la terre, de l’air, des semences, de l’eau et des autres ressources. Les gouvernements s’autorisent ainsi à allouer à de grosses industries polluantes des permis afin qu’elles puissent échanger entre elles des « droits à polluer ». D’autres programmes encouragent les pays industriels à financer la capture de carbone en réalisant des plantations à large échelle dans les pays du Sud, ceci leur permet de ne pas avoir à réduire leurs propres émissions. C’est ainsi que de grandes plantations ou des réserves naturelles sont créées en Asie, en Afrique, en Amérique Latine en expulsant de leurs terres des communautés indigènes et en réduisant leurs droits d’accès à leur propre forêts, champs ou rivières…
Les plantes et arbres génétiquement modifiés
Les arbres et les plantes génétiquement modifiés sont désormais développés pour la production d’agrocarburants. Les organismes génétiquement modifiés ne résoudront aucune crise environnementale puisqu’ils représentent eux-mêmes un risque pour l’environnement, la santé et la sécurité. De plus, ils renforcent le contrôle des multinationales sur les semences et empêchent les agriculteurs de jouir de leurs droits pour semer, développer, sélectionner, diversifier et échanger leurs propres semences. Les arbres et les plantes génétiquement modifiés vont servir pour la deuxième génération d’agrocarburants qui seront fabriqués à partir de cellulose à la différence de ceux de la première génération qui sont obtenus à partir de sucres provenant des plantes. Même s’ils n’avaient pas recours aux organismes génétiquement modifiés, la seconde génération d’agrocarburants soulève des préoccupations équivalentes à la première.
La souveraineté alimentaire permet à des millions de personnes de survivre et protège la vie sur terre
Via Campesina pense que des solutions à la crise actuelle doivent émerger des acteurs sociaux qui développent des modes de production, de commerce et de consommation fondés sur la justice, la solidarité, et une vie en société plus saine. Aucune solution technique ne permettra de sortir du désastre environnemental et social actuel. En revanche, l’agriculture durable à plus petite échelle requiert une main d’œuvre importante mais peu d’énergie fossile. Elle peut donc contribuer à refroidir la terre :
En favorisant, par des pratiques agronomiques durables, un stockage plus important du CO2 dans la matière organique du sol (par exemple, l’élevage extensif des bovins et la production ovine sur prairies ont un bilan effet de serre positif)
En remplaçant, comme c’est le cas en agriculture biologique, les engrais azotés chimiques par des engrais organiques et/ou en intégrant dans les rotations des plantes fixatrices de l’azote de l’air.
En produisant du biogaz à partir des déchets animaux et végétaux, tout en veillant à une restitution suffisante de matière organique pour l’entretien des sols.
En produisant de l’énergie solaire sur tous les toits des bâtiments agricoles (avec des soutiens publics pour aider les petites fermes à investir…)
Partout dans le monde, nous pratiquons et nous défendons l’agriculture familiale durable et à petite échelle, et nous réclamons la souveraineté alimentaire. La souveraineté alimentaire est le droit des populations à avoir une alimentation saine qui leur soit culturellement adaptée et produite grâce à des méthodes respectueuses de l’écologie et durables. C’est leur droit à définir eux-mêmes leur alimentation et leurs systèmes de production. La souveraineté alimentaire met au cœur des systèmes de production et des politiques les aspirations et les besoins de ceux qui produisent, distribuent et consomment les aliments au lieu d’y mettre la demande du marché et des multinationales. Elle donne la priorité aux économies et aux marchés locaux et nationaux. Elle redonne du pouvoir aux paysans et aux familles qui tirent leurs revenus de l’agriculture, de la pêche artisanale, du pastoralisme, de la production, de la distribution et de la consommation d’aliments produits de manière durable, c\'est-à-dire en respectant l’environnement, les hommes et les femmes, et l’économie.
Nous demandons urgemment :
1/ Le démantèlement intégral des multinationales de l’agrobusiness : Elles volent la terre aux petits paysans, produisent une alimentation de très mauvaise qualité et provoquent des désastres environnementaux.
2/ Le remplacement de l’agriculture et de l’élevage industriel par une agriculture durable pratiquée sur de petites fermes, ceci grâce à des programmes de réformes agraires adaptés.
3/ La promotion de politiques énergétiques saines et durables. C\'est-à-dire basée sur une moindre consommation d’énergie, la production d’énergie solaire et de biogaz sur les fermes au lieu d’une incitation excessive à consommer des énergies fossiles comme c’est actuellement le cas.
3/ La mise en œuvre de politiques agricoles et commerciales au niveau local, national et international qui soutiennent véritablement l’agriculture durable et la consommation d’aliments de proximité. Ceci implique l’interdiction des subventions qui favorisent les pratiques de dumping pour les produits alimentaires.
Pour la survie de millions de petits paysans au travers le monde,
Pour la santé des personnes et la survie de la planète,
Nous réclamons la souveraineté alimentaire et nous nous engageons à lutter pour l’obtenir collectivement.
https://www.alainet.org/es/node/124290
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