Chavez : Perte énorme, riche héritage, avenir fragile

07/03/2013
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Plusieurs personnalités et organisations haïtiennes sont unanimes à reconnaitre « la perte énorme » que constitue la mort d’Hugo Chavez pour le Venézuela en particulier et les peuples latino-américains en général. Pourtant quant à l’avenir « du riche héritage du socialisme du XXIe siècle », le total optimisme n’est pas au rendez-vous. Un avenir fragile est évoqué.
 
Le socialisme du XXIe siècle est le projet socio-politico-économique d’Hugo Chavez d’unifier l’Amérique latine dans une perspective de solidarité entre les peuples et d’opposition à l’impérialisme étasunien sur le continent.
 
En ce sens, le défunt président vénézuélien a été à la base d’importantes initiatives dont l’Alliance bolivarienne des Amériques (Alba) en 2006, la Communauté d’Etats latino-américains et caribéens (Celac), la Banque du Sud et le projet de monnaie unique pour l’Amérique latine : el sucre.
 
Camille Charlmers, professeur d’université et militant social qui connaît bien l’expérience vénézuélienne, a accueilli la nouvelle de cette « grande perte pour le peuple vénézuélien et pour l’Amérique latine [avec] une profonde douleur et certaines préoccupations ».
 
C’est le même point de vue chez Nixon Boumba, sociologue, militant au sein du mouvement démocratique populaire (Modep).
 
Se questionnant sur le sens de la mort de Chavez pour la lutte contre l’impérialisme étasunien, Boumba consent que « c’est un coup dur pour cette lutte ». Aussi s’interroge-t-il sur les « assises pour continuer le combat » ?
 
« Le départ prématuré du président Hugo Chavez est un coup dur pour le peuple vénézuelien. C’est aussi une perte énorme pour les peuples du globe qui luttent pour leur émancipation », écrit, de son coté, le Comité de solidarité Haïti-Venezuela dans un communiqué signé de l’ancien sénateur Rony Mondestin.
 
L’héritage de Chavez
 
Pour Charlmers, « El comandante a laissé un actif extrêmement impressionnant en termes d’innovations politiques, de rupture avec la domination des Etats-Unis et par rapport à la politique néolibérale ».
 
Au nombre de ces innovations politiques, il est à souligner l’introduction dans la constitution bolivarienne du référendum révocatoire en 2004, souligne Chalmers.
 
Ce droit civique dont jouit le peuple du Venezuela lui permet de révoquer par référendum le président à mi-mandat au cas où ce dernier n’aurait pas tenu ses promesses électorales. Chavez en a lui-même fait l’expérience. Le référendum est sorti en sa faveur à 58%.
 
En Bolivie et en Equateur, cet exemple est suivi.
 
Selon Charlmers, en gagnant les élections présidentielles en 1998, « Chavez a montré la possibilité de changer l’orientation de la société et d’avoir des victoires contre l’impérialisme et l’oligarchie locale sur leur terrain privilégiée de lutte que sont les élections ».
 
Chavez a remporté toutes les élections auxquelles il a participé depuis son accession au pouvoir. Cependant, à la dernière joute électorale qui lui a permis d’être réélu en octobre 2011, la différence de score avec son adversaire de l’opposition n’était pas très grande.
 
Ce qui inquiète le militant du Modep, qui entrevoit « des virages néolibéraux dans certains pays latino-américains ».
 
Boumba qualifie d’ « expérience inspirante » tous les apports de « ce riche héritage du socialisme du XXIe siècle ».
 
Selon certains analystes, le Venezuela a fait des progrès extraordinaires par rapport à la période ante-Chavez.
 
Au nombre de ces progrès, sont cités : l’élimination de l’analphabétisme ; 6 millions de personnes sorties de la pauvreté ; la reprise en mains par l’Etat d’actifs stratégiques comme les hydrocarbures, les télécommunications, l’électricité, etc.
 
« Les apports de Chavez vont survivre à sa disparition physique. Ils continueront à vivre pendant très longtemps. Ils ont complètement changé la face de l’Amérique latine. Chavez, avec l’Alba, a montré la possibilité de commencer à construire le socialisme dans un continent où l’on prétend que les intérêts stratégiques des Etats-Unis dominent », estime le professeur Charlmers.
 
Espoir… Incertitudes
 
Le comité de solidarité Haïti-Venezuela a de l’espoir. Il croit que « le peuple vénézuélien dressé en bloc comme un Virgile veillera à ce qu’aucune force ne vienne contrarier le processus révolutionnaire en cours ».
 
Charlmers pense que cette force contrariante peut être une offensive de la droite du Venezuela pour mettre à profit cette disparition de Chavez.
 
En tout cas, pour Boumba, l’avenir dépend de la mobilisation populaire et du renforcement de la régionalisation du socialisme du XXIe siècle lancé et prôné par Chavez.
 
Même s’il croit que « la mémoire de Chavez va alimenter les luttes populaires », Charlmers soulève des inquiétudes liées à une éventuelle faiblesse des structures organisationnelles au Venezuela.
 
« On ne sait pas si le Parti socialiste unifié du Venezuela est suffisamment solide pour affronter cette nouvelle situation avec la perte de son leader charismatique qui n’est pas facile à remplacer. Tout dépend de la capacité des dirigeants dont, le vice-président Nicolas Maduro, à maintenir le cap sur les changements et aussi à donner des résultats sur tous les plans », dit-il.
 
Hugo Chavez a rendu l’âme le 5 mars dans son pays natal, terrassé par un cancer dans la région pelvienne.
 
 
https://www.alainet.org/fr/articulo/74339
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