Haïti : Les droits syndicaux bafoués

18/09/2007
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Haïti est l’un des pays où les libertés syndicales sont, dans la pratique, bafouées par les employeurs qui profitent de la faiblesse d’instruments légaux réglementant le marché du travail.

C’est, en substance, le constat dressé par la Confédération syndicale internationale (Csi) dans son rapport 2007, publié ce 18 septembre 2007 à Bruxelles (Belgique) et dont a pris connaissance l’agence en ligne AlterPresse.

Le contenu de ce rapport sur les violations des droits syndicaux, qui couvre 138 pays, dont Haïti, met en exergue l’augmentation alarmante du nombre de personnes assassinées en raison de leurs activités syndicales, passant de 115 (en 2005) à 144 (en 2006).

En Haïti, les droits d’organisation et de négociation collective sont pratiquement inexistants, souligne ce rapport qui précise que les employeurs bénéficient d’une liberté totale, due au chaos politique des dernières années, au climat de violence et au phénomène du chômage qui frappent le pays.

Le rapport fait également état de « la complicité d’un appareil étatique assez faible » qui permet aux employeurs d’agir en toute quiétude.

« Les employeurs imposent généralement les salaires de façon unilatérale. Les conditions de travail sont généralement déplorables et ne correspondent pas aux normes sanitaires et de sécurité », lit-on dans ce rapport attirant ainsi l’attention sur l’absence de lois ou la faiblesse des institutions étatiques.

Selon le rapport 2007 de la Csi, le Code du travail concerne essentiellement le secteur privé. Cet instrument légal, d’essence duvaliériste, exclut de son champ d’application plusieurs catégories de travailleurs, tels les travailleurs domestiques, les mineurs, ainsi qu’il empêche les travailleurs étrangers d’occuper des fonctions de dirigeants syndicaux.

« Beaucoup de travailleurs sont employés sans contrat ou ignorent l’existence du Code du travail. Il arrive même que les travailleurs ne connaissent pas le nom de l’entreprise dans laquelle ils évoluent et se trouvent donc dans l’incapacité de défendre leurs droits », dénonce le rapport de la Confédération syndicale internationale.

Les employés de la fonction publique, les paysans, les travailleurs indépendants et les travailleurs de l’économie informelle ne sont pas couverts pas le Code du travail, ajoute le rapport de la Csi.

La question du salaire minimum est aussi évoquée dans ce rapport qui indique que « les employeurs, prétextant le désir des Haïtiens de travailler à n’importe quel prix, commettent régulièrement des abus en nivelant par le bas les salaires proposés, ignorant jusqu’au salaire minimum légal établi par la législation haïtienne ».

A date, rien n’est encore tiré au clair concernant le salaire minimum. Cependant, Steeven Benoît, député de Pétionville (à l’est de la capitale), envisage, à travers un projet de loi, un salaire de l’ordre de cent cinquante (150) gourdes pour les ouvriers, une façon pour lui de contribuer à l’amélioration des conditions de vie de cette catégorie socioprofessionnelle.

Le gouvernement Lavalas de Jean-Bertrand Aristide a quand bien même réussi à porter à 70 gourdes le salaire minimum, en dépit des tollés qu’une telle décision avait suscités lors de sa présidence déjà contestée par un large secteur de la société haïtienne.

Selon la Confédération syndicale internationale, les gouvernements haïtiens qui se sont succédé n’ont jamais pris de mesures concrètes pour faire appliquer la loi concernant la liberté syndicale et le salaire minimum.

Une réforme, rendant la législation haïtienne conforme aux normes de l’Organisation internationale du travail (Oit) en matière de droits syndicaux, est à l’étude depuis plusieurs années. Les promesses de mesures, pour la protection des travailleurs et contre tout type de discrimination antisyndicale, sont, jusqu’à présent, insatisfaites, selon le rapport 2007 de la Csi.

Au niveau de la zone franche d’exportation (Zfe) de Ouanaminthe (Nord-Est d’Haïti), des progrès sont à signaler depuis l’intervention de la Société financière internationale (Sfi), une filiale de la Banque mondiale qui octroie des prêts au secteur privé.

La Sfi avait conditionné son prêt au respect, par l’entreprise dans la zone franche, de la liberté syndicale et du droit de négociation collective. Cependant, signale le rapport, les droits des travailleurs sont régulièrement enfreints et des tentatives pour former un syndicat ont entraîné des licenciements, et notamment un licenciement massif de 350 travailleurs en juin 2004.

Aujourd’hui, la Confédération syndicale internationale note que cette situation est sur le point d’être améliorée. À la suite d’une campagne nationale et internationale, les travailleurs ont été réintégrés, le syndicat a été reconnu et une convention collective a été signée à la fin de 2005 à Ouanaminthe.

En termes de droits syndicaux, les cinq parcs industriels qui se trouvent dans la capitale haïtienne ressemblent à la majorité des Zfe implantées dans la région des Amériques, d’après la Csi.

http://www.alterpresse.org/spip.php?article6418

https://www.alainet.org/pt/node/123318
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