Meilleures salutations sergio
Porto Alegre 2005: le Forum du possible
30/01/2005
- Opinión
A quelques heures de la fin de sa 5e session, , l'heure des
bilans est arrivée, ainsi que celle des questions de fonds
sur l'avenir du Forum social mondial (FSM).
Après six jours de débats dans plus de 2000 activités
diverses - organisées par 5000 organisations et mouvements de
130 nations différentes -, il n'y a pas de place pour une
évaluation «arithmétique».
Il est impossible de mesurer, avec des paramètres exacts, la
confluence de plus de 100.000 participant/es venu/es des cinq
continents. Il est encore beaucoup plus difficile de tirer des
conclusions sur un forum,qui évite par essence les documents
finaux ou les déclarations synthétiques.
« Le Manifeste de Porto Alegre: douze propositions pour un
autre monde possible», signé à titre individuel par 19
intellectuels de rénommée mondiale, même s'il synthétise
partiellement la pensée altermondialiste, ne représente
cependant pas *officiellement* le Forum dans son ensemble.
Crise d'identité ?
Durant ces dernières heures, certains des signataires - dont
le sociolgue brésilien Emir Sader - avaient souligné le
problème du « manque d'identité » du FSM.
Dans son édition de dimanche 30 janvier, le journal « Zero
Hora» (publié à Porto Alegre), titrait à propos du Forum
social mondial et du Forum économique mondial, de Davos : «
Les forums connaissent une crise d'identité ». A l'appui de
cette affirmation, un article explique que « Davos met la
lutte contre la pauvreté au centre de ses débats et Porto
Alegre tente de passer de la critique contestaire à la
recherche de solutions ».
La charte de principes du FSM (avril 2001) n'a pourtant pas
été remise en cause ou modifiée durant cette cinquième
session. Cela implique que cet événement-processus, qui se
définit comme un « espace de réflexion et d'échange pour le
mouvement social » dans la recherche d'alternatives viables
continue d'être ce qu'il fut, il y a 4 ans, lors de sa
naissance.
La route vers une définition comme espace de convocation de
la société civile planétaire se reforce toujours plus, par
rapport à sa conception originelle d'un « anti-Davos du Sud »,
slogan médiatique tombé dans l'oubli. Le Forum de Davos
n'apparait plus aujourd'hui dans la mémoire et dans la
réflexion des participant/es au Forum de Porto Alegre, si ce
n'est par la signification symbolique de se tenir en même
temps que le rendez-vous suisse.
La capacité de convocation
La marche massive d'ouverture, mercredi 26 janvier - la plus
grande de l'histoire récente de la capitale du Rio Grande do
sul - a constitué un point significatif de la nouvelle formule
autogestionnaire du FSM.
Moins animée que celles des années précédentes, moins
coloriée et bouillonnante qu'à Mumbai (Inde), la mobilisation
des 200.000 personnes qui, durant trois heures, remplirent les
rues centrales de Porto Alegre apporte pourtant des contenus
de choix. Moins « organisée » y « partidaire » qu'auparavant
- peut-être à cause des tensions internes du Parti des
Travailleurs (qui gouverne le Brésil) -, cette marche a
constitué une expression plus authentique de la société civile
planétaire. Ou tout au moins, des milliers de délégué/es de
cette dernière, qui ont fait souvent de grands efforts
financiers pour venir à cette 5e session.
L'accent culturel de l'ouverture du FSM, la diversité des
manifestant/es et leurs consignes, ainsi que la liberté
totale de manifester contrastant avec la militarisation de
Davos (6500 soldats suisses, sans compter les effectifs des
forces de police, déployés pour protéger les "saigneurs" du
monde...) marquèrent l'ambiance du forum et en furent une
expression cohérente.
La capacité de convocation du FSM, qui semble n'avoir ni
frontières ni limites imaginables, fut nettement différente
par rapport à Mumbai.
Et les « dalits » brésiliens ?
L'abandon de l'Université pontificale catholique (PUCA),
siège des trois premières sessions en 2001, 2002 et 2003,
pour les rives de la lagune Guaiba, a donné une plus grande
authenticité et popularité au Forum. Même si cela n'a pas
permis de faire le saut qualitatif de « marginalité des
participants», que s'étaient fixés les organisateurs
A l'exception des travailleurs sans terre, des femmes
paysannes (et de Via Campesina), et de quelques autres
secteurs minoritaires, les secteurs les plus marginalisés du
pays et les groupes autochtones-indigènes de la région ne
prédominèrent pas à Porto Alegre.
Les « dalits » (sans castes) et les « adivasi » (peuples
autochtones) hindous, qui s'approprièrent le forum il y a un,
n'ont pas trouvé d'équivalents dans cet énorme pays d'Amérique
latine. Les secteurs de la calsse moyenne ont repris le dessus
dans la session de 2005. Toutefois, la participation massive
des jeunes - plus présents que lors des précédentes sessions
- permet d'assurer que le saut qualitatif de Porto Alegre
2005 fut surtout générationnel.
Les priorités thématiques.
La grande variété thématique confronte les participant/es à
une réalité double contradictoire que vit le forum dans son
essence. L'effort pour convoquer les acteurs sociaux les plus
variés - basé sur la réalité brésilienne - implique un
labyrinthe thématique,qui ne facilite pas le choix des
priorités dans les débats. Une fois de plus, le programme a
mêlé les expériences les plus locales avec les réflexions
globales et synthétiques de la dynamique mondiale.
Cette dynamique interne montre bien la richesse de ce
processus-évenement, elle prouve aussi qu'il est impossible
d'arriver à des synthèses globales, lorsqu'on part de niveaux
si distincts de réflexion. Deux constats ont marqué la
dynamique quotidienne et la présence des participant/es.
Premièrement, les grandes personnalités - comme Eduardo
Galeano, Frei Betto, Leonardo Boff, Boaventura dos Santos,
pour n'en citer que quelques-uns - sont des points de
référence non-négociables pour les participants.
Ce qui prouve l'état toujours « en construction » du
mouvement altermondialiste planétaire. Et la nécessité
impérieuse pour ce dernier de s'appuyer sur des figures
charismatiques de références.
De plus, il prouve un objectif du FSM, que l'on saurait sous-
estimer. Outre d'être un lieu de réflexion et de débata, il
aussi lieu d'apprentissage. Ansi, la « consommation de
théorie » est appréciée par les altermondialistes et constitue
une motivations pour une grande partie des participant/es.
Deuxièmement, la réflexion stratégique sur un « autre monde
possible » ne peut s'isoler des variables politiques
conjoncturelles qui touchent et mobilisent « ici et maintenant
».
Preuve en est que les deux cas, où le stade Giganthino (prévu
pour 13.000 personnes) connut une affluence... gigantesque,
furent les réunions avec les présidents Lula (Brésil) et Hugo
Chavez (République bolivarienne du Venezuela), deux des
figures les plus charismatiques de l'actualité latino-
américaine.
Définition d'axes prioritaires
De la même manière que Mumbai, l'année passée, avait été le
Forum anti-guerre, Porto Alegre 2055 fut un espace où
apparurent quelques axes thématiques prioritaires.
L'eau - et la résistance à sa privatisation -, les droits
humains dans leur vision la plus intégrale, le non-paiement de
la dette, la souveraineté alimentaire et le droit à la
communication ont occupé une place prioritaire.
Ce sont des thèmes sur lesquels le mouvement altermondialiste
semble avoir commencé à élaborer un programme pratique
d'action conjointe et des pistes plus claires pour organiser
une résistance unique. Insérés « récemment » dans l'ordre du
jour des mouvements sociaux, la lutte pour l'eau - avec toute
sa symbolique propre - et l'information/communication comme
droit fondamental des citoyen/es prennent force, en
nourrissant et en se nourrissant du FSM qui a été durant les
4 dernieres années une catapulte multiplicatrice.
Les nouveautés.
L'autogestion de toutes les activités - vérifiée dans la
pratique - et la diversité des organisations et des mouvements
qui ont conflué dans des débats communs apparaissent comme
deux éléments où Porto Alegre no 5 a surpassé tous les autres
forums antérieurs.
La décision du Conseil international de tenir le FSM 2007 en
Afrique a été unanimement approuvée.
Des doutes subsistent pourtant quant à la proposition de
tenir en 2006 (année intermédiaires) 3 ou 4 forums régionaux
d'une certaine importance, au Venezuela, au Maroc et en Corée
du Sud (décision à confirmer en avril 2005). Ces événements
décentralisés pourront-ils attirer l'attention médiatique
comme le réussit aujourd'hui un FSM unique et centralisé?
Ne court-on pas le risque de diviser les forces et de donner
une image de faiblesse à un moment où le processus
altermondialiste a besoin d'exprimer sa force propre ?
En tout cas, le FSM vient de franchir un pas bien plus
important que lors des quatre années précédentes. Bien que les
défis soient grands et les réponses en attente significatives,
le FSM continue de se consolider comme un espace
incontournable de rencontre, d'échange, de définitions
d'agendas communs et de renforcement des réseaux.
Sergio Ferrari (envoyé spécial à Porto Alegre) Traduit de
l'espagnol par Hans-Peter Renk Collaboration E-CHANGER
* Le manifeste de Porto Alegre
19 intellectuels de cinq continets ont rendu public samedi 29
janvier un texte intitulé « Manifeste de Porto Alegre: 12
propositions pour un autre monde possible ».
Parmi les signataires: Riccardo Petrella, Ignacio Ramonet,
Frei Betto, Roberto Savio, Eduardo Galeano, Adolfo Perez
Esquivel, Emir Sader, François Houtart, Saramago, Cassen,
Bello, Wallestein, etc.
Après avoir revendiqué la force et l'apport du Forum social
mondial y constaté que « le mouvement altermondialiste s'est
transformé en une force déjà très prise en compte sur toute la
planèt » , les signataires - qui le font à titre personnel,
énumèrent 12 propositions communes pour « un autre monde
possible »
Parmi ces propositions: l'annulation de la dette des pays du
Sud ; l'application de taxes internationales sur les
transactions financières; le démantèlement de toutes les
formes de paradis fiscaux; le rejet des règles libres-
échangistes fixées par l'Organisation mondiale du commerce ;
la mise en oeuvre d'un commerce juste.
Le document défend le droit à la souveraineté alimentaire; il
s'oppose à tout brevet sur la connaissance et les êtres
humains; il s'appose à toutes les formes de discrimination et
appelle à prendre des mesures urgentes pour mettre fin à la
destruction de l'environnement.
Il exige également le démantèlement des bases militaires
étrangères, le droit à l'information et à informer les
citoyen/es - contre la concentration monopolistique des médais
- et appelle à une profonde réforme des organisations
internationales, dont l'ONU.
Ce document présente cependant quelques points faibles: une
seule femme l'a signé et le NON à la guerre n'est pas
explicité clairement. De plus, des signatures essentielles -
par exemple, les personnalités brésiliennes qui ont fondé le
Forum social mondial - n'y figurent pas. « Cela n'indique pas
des dissidences ou des différences... Ce document ne parle
pas au nom du FSM, il présente seulement l'opinion
personnelle de quelques-uns d'entre nous», a déclaré Ignacio
Ramonet.
* Sergio Ferrari. Porto Alegre.
https://www.alainet.org/es/articulo/111256
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