La démocratie participative en action
Vers une assemblée constituante en Bolivie
12/03/2004
- Opinión
La Paz.- Le vendredi 20 février, le président Carlos Mesa a
promulgué la réforme de la Constitution, une réforme qui
inclut les figures du référendum (effectif/ décisionnel ou
consultatif, sur des questions d'intérêt national) et
l'assemblée constituante dont la mission sera de rédiger une
nouvelle constitution. La grande mobilisation d'octobre
dernier avait commencé avec deux exigences principales ; la
reconnaissance des hydrocarbures comme patrimoine de l'Etat
bolivien et la convocation d'une telle assemblée
constituante. Face à ces revendications, le gouvernement de
Gonzalo Sanchez de Lozada n'avait offert comme seule réponse
qu'une répression sanglante qui ne s'est terminée qu'avec sa
démission et sa fuite du pays.
Pourquoi une assemblée constituante ?
La revendication d'une assemblée constituante a commencé à
se dessiner au cours des mobilisations de l'année 2000, sous
le gouvernement de Hugo Banzer. Cette exigence est née au
sein des secteurs populaires en tant que réponse à
l'application du modèle néolibéral qui a aggravé la misère
en bradant les ressources naturelles et l'appareil productif
du pays au profit des multinationales. Les secteurs qui
soutenaient cette demande exigeaient une modification
radicale de la Constitution, avec l'objectif d'établir une
nouvelle structure étatique qui garantisse la satisfaction
des besoins sociaux du peuple.
Cet appel à la convocation d'une assemblée constituante a
rapidement trouvé un écho dans beaucoup de secteurs
populaires. En juin 2002, peu avant la fin du mandat de
Jorge Quiroga, qui avait succédé à Banzer au cours de la
dernière année de ce gouvernement, une marche indigène avait
parcouru le pays depuis Santa Cruz jusqu'à La Paz avec comme
unique mot d'ordre la demande d'une assemblée constituante.
A quelques jours de la fin de leurs mandats, les partis au
pouvoir avaient signé un accord avec les marcheurs afin
d'inclure cette revendication dans la Loi de Nécessité de
Réforme de la Constitution. Mais, comme tant de fois par le
passé, ils n'ont pas respecté leurs engagements et ont
approuvé cette loi sans inclure la question de la
Constituante.
Un tel déni a eu comme conséquence importante de
sensibiliser également la classe moyenne. Lorsque Sanchez de
Lozada entre en fonction, la Constituante était devenue
l'une des thématiques les plus exigées d'entre toutes. En
janvier 2003, déjà, Goni (surnom de Sanchez de Lozada) avait
affronté une mobilisation des secteurs paysans qui ne
luttaient nullement pour leurs intérêts particuliers mais
bien pour ceux de la nation : retour au bénéfice du pays des
ressources naturelles et convocation d'une Constituante.
Les sanglantes journées de février et d'octobre 2003 ont
fait qu'il est désormais impossible de nier ces deux
exigences. Goni et ses principaux collaborateurs ont fui le
pays et le nouveau président a annoncé, dans son discours
d'intronisation, qu'il respecterait le mandat populaire.
La Constituante est un processus
Incorporée à la Constitution politique de l'Etat (CPE),
l'assemblée constituante peut être convoquée dans un futur
proche. Le texte constitutionnel précise qu'elle sera
appelée via une loi approuvée par le Congrès national à
laquelle le président ne peut opposer son véto. La loi de
convocation précisera le nombre de constituants, la manière
dont ils seront élus et, sans doute, la durée de leur
fonction.
Dans l'exercice d'une démocratie participative qui sera
ainsi initiée, on rédigera cette loi en tant que conclusion
d'un processus de séminaires, ateliers, consultations,
enquêtes, qui devront se faire dans tout le pays.
Il y a de nombreuses propositions concernant principalement
la forme de l'élection des constituants. Elles vont de la
désignation corporative jusqu'à l'élection d'un nombre égal
de représentants dans chacun des 9 départements, sans tenir
compte du nombre de leurs habitants. Le plus probable, sans
doute, est que l'on procédera à une élection qui garantisse
une représentation adéquate des différents secteurs de la
société et des différentes régions du pays. Avec cette
méthode, la réforme constitutionnelle supprime le monopole
des partis politiques pour que les regroupements citoyens
des villes et de la campagne puissent directement présenter
leurs candidats.
Quant au nombre de constituants, certains souhaitent qu'il
soit le plus réduit possible en argumentant que de cette
façon l'assemblée aura l'efficacité adéquate. D'autres, au
contraire, préfèrent une représentation plus nombreuse qui
garantisse la présence de tous les secteurs. Il faudra
trouver un juste milieu qui puisse rendre possible une
représentation sociale et régionale satisfaisante sans être
massive.
Refonder le pays
Convoquer une assemblée constituante afin de seulement
élargir les droits citoyens et perfectionner l'appareil
d'Etat serait quelque chose de superflu. Pour ce faire, il
suffit d'une réforme partielle de la Constitution politique
de l'Etat. La Constituante aura au contraire la mission de
donner une nouvelle charte fondatrice au pays. L'actuelle
constitution a un profil clairement libéral : droits et
devoirs des individus, structure classique de l'Etat,
garantie de la propriété privée, etc. Les processus
populaires des 70 dernières années y ont ajouté quelques
conquêtes sociales : droits syndicaux, protection des
parcelles paysannes, et, plus récemment, la reconnaissance
du caractère multiculturel et multilingue de notre société.
Depuis 1985, l'imposition du modèle néolibéral a fait que
ces conquêtes sociales ont été piétinées par les
gouvernements successifs. Ainsi, les ressources naturelles
ont été offertes aux multinationales. Les syndicats ne sont
pas reconnus par les patrons. Les grèves sont
automatiquement déclarées illégales par le Ministère du
Travail. La parcelle paysanne n'a aucune protection. Même
les droits fondamentaux de la personne, comme le droit au
travail, n'ont aucune valeur dans les faits.
Mais comme nous l'avons dit, il ne s'agit pas seulement de
restituer ou de consolider ces droits. La nouvelle
Constitution politique de l'Etat doit inclure, pour la
première fois dans l'histoire de la Bolivie, les
conceptions, les us et coutumes, la culture même, des
peuples indigènes qui composent la majorité de notre
société. Et le premier élément de ces concepts est la
récupération de la structure productive du pays qui a été
détruite afin de laisser libre champ au modèle colonial.
L'Etat doit se constituer en promoteur de la production
nationale avec un gouvernement organisé de telle sorte que
tous ses mécanismes contribuent à ce processus. La
législation devra s'élaborer dans une assemblée législative
réellement représentative de la société et soumise à son
contrôle. La justice devra être rendue par des tribunaux qui
devront être responsables devant la société. Telle est
l'ampleur de la tâche qui attend l'assemblée Constituante.
Source : ALAI - Agencia Latinoamericana de Información, 24-
02-04.
Traduction : Ataulfo Riera, pour RISAL.
https://www.alainet.org/es/node/109648?language=es
Del mismo autor
- La batalla de las ideas 05/06/2012
- La prepotencia transportista 10/05/2012
- Caminante, no hay camino 10/05/2012
- Un salario de 8 mil bolivianos 11/04/2012
- Talón de Hierro de Jack London 10/04/2012
- Qué hacemos en el Congo? 09/04/2012
- Hasta dónde avanzamos 08/04/2012
- 6060 años: record mundial 18/03/2012
- Lindes, límites y fronteras 02/02/2012
- Coca Cola: tome más… cara 01/02/2012
