Pour une Banque du Sud qui respecte les Droits des Peuples

16/12/2007
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La création de la Banque du Sud éveille actuellement une expectative croissante car elle donne enfin la possibilité  d’avancer dans la construction  d’un financement alternatif, souverain et solidaire.  Pour cela, lors de la signature de « l’Acte Fondamental » de cette nouvelle entité, avec des centaines de mouvements, de réseaux, d’organisations et de personnalités du monde entier, nous demandons aux Présidents concernés d’intervenir pour qu’il s’agisse d’un véritable « Organisme Ouvert à tous », et nous leur offrons nos propositions pour qu’ils s’assurent que cette Banque puisse contribuer  effectivement à l’intégration, au respect des droits humains et environnementaux et au droit des peuples à leur propre auto-détermination et à leur propre développement.

Nous voulons ici manifester notre conviction que cette nouvelle entité Sud-Sud doit être bien supérieure à ce qui existe actuellement et ne doit pas reproduire les modèles des organismes multilatéraux actuels comme la Banque Mondiale, le FMI, la BID (Banque Interaméricaine de Développement) et la CAF pour l’Afrique, organismes dont les comportements sont reconnus par tout le monde comme non-démocratiques, sans transparence, régressifs et discrédités à cause de leurs expériences négatives d’ouverture économique, et les conséquences qui en résultent toujours d’un plus grand endettement des pays. En drainant les capitaux vers le Nord, ils privatisent le patrimoine public, dérégulent les services de base et causent de grandes souffrances pour la région.

De plus, nous constatons que l’existence des conditions économiques et politiques actuelles sont propices pour que cette nouvelle Banque devienne l’instrument principal de l’épargne populaire et de la redistribution des richesses. Cela rompra le cycle récurrent de la mise à sac des richesses et du détournement des efforts de la nation et des régions. Avec des manœuvres et des négociations secrètes, ils produisent un endettement croissant et les titres publics profitent à des groupes économiques et financiers privés et privilégiés qui favorisent les mouvements spéculatifs d’entrée et de sortie des capitaux. C’est dans ce sens qu’il serait nécessaire que les gouvernements intéressés avancent dans mise en fonctionnement d’une nouvelle architecture financière régionale qui puisse inclure à la fois la création d’un Fonds du Sud faisant fonction de Banque Centrale continentale et la mise en place d’une monnaie commune.

Cette seconde Lettre Ouverte aux Présidents exprime notre ferme conviction à propos de la nécessaire transparence des négociations et de la participation des mouvements sociaux dans la mise en place du  nouveau fonctionnement de cette Banque. Cela exige de la part des gouvernements qu’ils informent et qu’ils consultent la société civile.  « L’histoire récente de la lutte contre les dictatures qui sévissaient dans tout le continent explique notre demande pressante d’ouvrir et de mettre sur pied de nouveaux espaces de participation et de démocratie directe » comme le signalait la première lettre, ainsi d’ailleurs que la demande de créer davantage de Sources autonomes de financement.  Il faut aussi que les gouvernements prennent des mesures pour réaliser des Audits intégraux des dettes publiques  imposées par des institutions financières internationales comme le FMI et la Banque Mondiale. Il faut mettre fin à l’impunité avec laquelle elles sont intervenues dans la région et renvoient encore les flux bénéficiaires des richesses vers les pays du Nord.

Une opportunité historique s’offre actuellement avec la création de la Banque du Sud. Avec les mouvements sociaux et les organisations signataires de cette Lettre, nous insistons sur l’importance que son fonctionnement pourrait promouvoir une nouvelle matrice de développement où les valeurs fondamentales seraient : la souveraineté de nos peuples sur leur territoire et leur propre développement, l’auto-détermination, la solidarité et la justice environnementale.  Nous rejetons la possibilité que cette Banque soit utilisée pour financer, par exemple, les méga-projets et les grands investissements des entreprises d’extraction de minéraux qui sont polluantes et socialement excluantes.  Elles représentent des modèles « d’intégration et de développement » subordonnés aux intérêts étrangers et très éloignés du « vivre bien » dont nos peuples et nos pays ont besoin.  Pour cela, nous demandons aussi à toute la société de se mobiliser pour débattre et agir, avec l’espoir que l’on profite de cette possibilité pour créer une véritable Banque Solidaire des Peuples du Sud.

le 7 décembre 2007

(Traduction: Francis Gély)


Adolfo Pérez Esquivel est Prix Nobel de la Paix et Président du SERPAJ  (le Service Paix et Justice).


Beverly Keene est Coordinatrice de Dialogue 2000 et de Jubilé Sud/Amériques.

https://www.alainet.org/fr/active/21278
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