22 ans de dégradation après le coup d’État militaire du 30 septembre 1991
29/09/2013
- Opinión
Des membres de divers secteurs de la vie nationale estiment que la République haïtienne continue encore de payer le lourd tribut du putsch du 30 septembre 1991 contre le président Jean Bertrand Aristide, ce, à plusieurs niveaux et en dépit de minuscules avancées constatées.
Une compréhension du 30 septembre
L’un des plus grands coups, portés à travers le putsch militaire, c’est « le sabotage du fondement des mouvements populaires », alors que la population faisait ses premières armes, dans la lutte organisée, pour revendiquer et défendre ses droits politiques, considère Sony Estéus, journaliste, directeur exécutif de la Société d’animation et de communication sociale (sigle créole Saks).
Autant dire que cet « évènement malheureux (…) allait être un frein à la construction démocratique » et engendrer « la perte de notre souveraineté », regrette Rosny Desroches, responsable de l’initiative de la société civile (Isc).
Le coup d’État militaire représentait « un refus du choix du peuple », selon l’ancien maire de la capitale, Evans Paul, dirigeant de la Confédération unité démocratique (sigle créole Kid).
Élu président le 16 décembre 1990 et entré en fonction le 7 février 1991, Jean Bertrand Aristide, ancien prêtre, a commis des impairs et a fait montre « de maladresses (…) qui ne justifient nullement, toutefois, le coup d’État », d’après Evans Paul.
Officiellement et dans les faits, les Forces armées d’Haïti (Fad’H) réalisent le coup d’État.
Jean Bertrand Aristide est contraint à l’exil et les États-Unis décrètent un embargo économique contre le pays.
Restant légalement le président du pays, quoiqu’en exil, Aristide va accepter, de la part des institutions internationales, telles « le Fonds monétaire international (Fmi) et la Banque mondiale (Bm), l’application des plans économiques qui allaient renforcer le néo-libéralisme en Haïti », estime Sony Estéus.
Coup d’État, coup fatal
« Les victimes du coup d’État n’ont jamais trouvé justice. Certains des organisateurs du putsch sont maintenant au pouvoir », déplore Pierre Espérance, directeur exécutif du Réseau national de défense des droits humains (Rnddh).
22 ans après, le pays « n’a pas évolué en matière d’État de droit et de stabilité » malgré les grands discours politiques venant de partout, toujours d’après les constats de Pierre Espérance.
À son retour d’exil, en octobre 1994, Jean Bertrand Aristide a décidé de démobiliser les Fad’H.
« La disparition de l’armée, ayant pour mission de garantir la souveraineté nationale, est fatale », souligne Evans Paul.
Pour lui, c’est la démobilisation de celle-ci qui « explique la présence de la Mission des Nations Unies pour la stabilisation d’Haïti (Minustah) aujourd’hui dans le pays ».
Les personnalités, interrogées par AlterPresse, s’accordent sur le fait que le coup d’État a détruit la production agricole, a laissé des milliers d’orphelines et d’orphelins, a renforcé les faiblesses institutionnelles et la situation de misère des masses.
Si le putsch a surtout fait des torts à la population, il a toutefois créé une conscience « anti-putsch », signale Rosny Desroches.
« On a fait du chemin, je pense que la majorité ne souhaite plus de coup d’État aujourd’hui », affirme-t-il.
Certainement « personne n’envisage plus cette possibilité, a part les personnes anormales », ajoute Evans Paul.
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