AAA = Affairisme, Arnaque et Aliénation

19/01/2012
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Pourquoi depuis quelques mois, noie-t-on l’actualité et les esprits avec cette affaire de « AAA » ? Pourquoi les agences de notation dont la naissance remonte au début des années 1900, deviennent-elles, soudain, le nombril du monde ?
 
Un masque pour l’affairisme
 
Les agences, à la base, sont des officines rémunérées par les détenteurs de capitaux, pour s’assurer de la rentabilité des titres qu’ils convoitent.
 
Dans un article très instructif, publié sur le site « investig’action », Xavier DUPRET nous rappelle que « Jusque vers la moitié des années 70, quiconque voulait investir une partie de son capital dans des titres financiers était libre d’avoir recours à une agence de notation afin d’évaluer les actifs sur lesquels il avait jeté son dévolu. Passé cette époque, ce sont les émetteurs de titres qui vont rémunérer directement leurs évaluateurs au prix de nombreux conflits d’intérêt. Au risque de nombreuses dérives. »
 
L’auteur nous indique également que «Avec le temps, le champ d’investigation des agences de notation, jusque là limité au seul secteur privé, a de plus en plus englobé la notation des dettes publiques. »
 
Depuis peu, on insiste dans les médias, sur le fait que les collectivités locales et les entreprises publiques (telle la SNCF) sont, elles aussi, évaluées par les dites agences. Au bout du compte, c’est à partir des notations obtenues que les banques déterminent à qui prêter et à quel taux !
 
En clair, les agences de notations sont strictement au service des spéculateurs. Aujourd’hui, on entend soumettre tous les acteurs économiques et politiques à leur seule notation.
 
Quand on sait que les trois agences contrôlant l’essentiel du marché de la notation (Standard and Poors, Fitch et Moody’s) sont basées aux Etats-Unis et qu’elles sont sous contrôle de la SEC (Securities and Exchange Commission, autorité qui supervise les marchés financiers dans ce pays), il devient manifeste que ceux qui font dépendre les politiques gouvernementales de la notation de ces agences (et ce dans tous les domaines) ne sont que des agents au service de la spéculation internationale.
 
Une vaste entreprise d’aliénation
 
On sait que dans ce monde dit moderne, la « communication » supplante l’information. La « communication » dont il s’agit, ici, ne signifie pas échange de messages entre interlocuteurs. Non ! C’est plutôt une mixture associant matraquage publicitaire, propagande, intoxication et conditionnement, servie par ceux qui veulent capter une clientèle, (au plan commercial ou politique) ou maintenir l’emprise d’un système sur un public et plus largement sur la société. Le pire, c’est que les victimes se font inconsciemment relais de l’offensive et que l’aliénation s’auto-reproduit dans l’opinion.
 
Pour tel journaliste,  parlant d’un réalisateur de film qui a reçu un prix aux USA, « Au moins, là, la France a son AAA ! » Pour tel dirigeant de club de foot, « si nous gagnons ce match nous aurons notre AAA ! »   Tout moun adan !
 
Là, réside l’entreprise d’aliénation qui « prive l’homme de lui-même  au profit d’une fin qu’il n’a pas librement choisie ».
 
Dès lors, quand gouvernants et économistes autorisés déclarent que, « Les marchés financiers ont bien réagi ! » à leurs mesures, beaucoup de ceux qui se sont laissés conditionner acceptent, bon gré mal gré, de s’y conformer. Dénonçons, au passage, la confusion abusivement entretenue entre « le marché » et les spéculateurs.
 
Les banques centrales, les institutions financières internationales, FMI ou autres, les émetteurs institutionnels d’obligations, ne sont-ils pas des acteurs du marché financiers ? Leur politique ne serait-elle que  réactions aux notations et aux fluctuations de la bourse ?
 
Les dessous de l’arnaque
 
C’est ici qu’il faut exposer les dessous de l’arnaque.
 
-      Le premier objectif de la campagne autour des notations est d’escamoter toute réflexion sur l’échec du système lui-même.
 
Si tel pays mérite de voir sa note baissée, c’est parce qu’il « n’a pas fait assez d’efforts ! » Les gouvernements, bras politiques du libéralisme, peuvent désormais utiliser autant leurs bonnes que leurs mauvaises notes pour justifier leur politique !
 
Ils font miroiter l’espoir qu’en conservant ou regagnant un « triple A » - ce qui exige, disent-ils, «de la rigueur et des sacrifices» - ils garantiront la fin du chômage, des licenciements, des faillites, bref de toutes les difficultés !
 
Non, mille fois non ! Le triple A ne sert qu’à signifier aux spéculateurs qu’ils peuvent espérer une rentabilité maximum pour leurs capitaux dans le pays concerné, quitte pour le gouvernement de celui-ci à provoquer la paupérisation de franges de plus en plus larges des populations.
 
-      Le deuxième objectif de la campagne est plus pernicieux encore.
 
Après avoir institutionnalisé le pouvoir des multinationales sur le commerce mondial par le biais de l’OMC, après avoir usurpé la souveraineté des nations dans le cadre du Conseil de Sécurité de l’ONU, il s’agit pour les maître du système d’instaurer formellement le pouvoir des spéculateurs sur la finance mondiale à travers leurs agences de notations.
 
Alors, avec ou sans « AAA », ce système doit disparaitre ! Seules doivent justifier l’attribution de bonnes notes aux différents gouvernements et pays, le partage équitable des richesses, le développement massif des services publics, la priorité donnée à  une protection sociale optimale et la possibilité de réel épanouissement pour tous.
 
- Robert Sae, Martinique Caraïbe.
https://www.alainet.org/fr/articulo/155325

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